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Choisir ses couverts d’interculture : anticipez !

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Les couverts d’interculture sont une culture à part entière. Il n’y a pas un couvert végétal passe partout mais celui qui correspond à vos attentes, à vos contraintes.

Pour choisir ses couverts, de nombreux paramètres sont à considérer : successions culturales, matériel disponible, coût des semences, les semences disponibles sur la ferme, la réglementation. Avant de se lancer directement dans le choix des espèces, il est conseillé de se poser les bonnes questions, de hiérarchiser ses objectifs.

Quels sont mes objectifs, mes contraintes à prendre en compte ?

1- Identifier les contraintes de la parcelle

  1.  Rotation ou succession culturales : on évitera de semer des moutardes, nyger, tournesol vecteurs de sclérotinia dans des rotations avec colza, légumes.
  2.  Durée de l’interculture : pour des couverts courts, éviter les espèces qui démarrent lentement, pour des couverts longs, viser des espèces qui ne grainent pas trop vite. En Bretagne, on peut avoir des soucis de moutarde blanche ou de sarrasin qui arrivent à graine pour des semis très précoces après orge, par exemple.
  3. Réglementation : respecter la réglementation en vigueur (Directive Nitrates) et le cahier des charges bio. La phacélie, l’avoine, par exemple, ne sont plus soumises à dérogation. Voir la liste des statuts à jour sur le site de SEMAE

2 - Définir un ou deux objectifs que vous attendez du couvert, parmi ces possibilités :

  1. fourniture d’azote pour la culture suivante
  2. production de fourrage ou CIVE
  3. protéger mon sol, maintenir la structure du sol
  4. couvrir mon sol le plus longtemps possible
  5. piéger les nitrates

3 - Vos contraintes pratiques et économiques ?

  1. Matériel disponible pour le semis et la destruction
  2. Coût des semences, utiliser de la semence de ferme : en bio on peut aller de 20 € à plus de 100 €/ha
  3. Date de semis possible : on vise le plus tôt possible après moisson pour profiter de l’humidité résiduelle.

Quelles espèces choisir pour les couverts, pour quel objectif ?

Après avoir mis à plat ses contraintes et objectifs, on se penche sur les espèces possibles à choisir.

Graminées : elles supportent un semis plus tardif, ont un fort potentiel de biomasse et de maintien de la structure avec un système fasciculé. Attention au niveau sanitaire avec des retours trop fréquents de céréales, à la gestion des repousses et la destruction. A associer avec une légumineuse pour compenser le C/N.

Légumineuses : elles peuvent capter l’azote atmosphérique pour le restituer si leurs nodosités ont le temps de se mettre en place. Attention, en bio, on déconseille la vesce velue (dormance des graines qui peuvent relever dans les cultures suivantes). Souvent, sauf à mettre un couvert dérobée, on proscrit les vesces en bio par précaution. Il y a une forte variabilité au sein des légumineuses : système racinaire, taille de la graine, date de semis optimale, tolérance à l’ombre… et elles sont assez chères. Il faut choisir la légumineuse adaptée à votre objectif ou à vos contraintes : la féverole se sème plus tard, les trèfles peuvent être semés trop creux ou étouffés et souvent ne démarrent bien qu’au printemps. On constate aussi parfois, à mettre trop de trèfles dans les rotations, une « fatigue » des légumineuses (aphanomycès, pythium).

Crucifères : facile à implanter, le développement est rapide, bon effet sur la structure du sol et souvent bonne couverture mais montée à graine possible et C/N parfois élevé si lignification de fin de cycle (moutarde blanche).

Autres familles : sarrasin, tournesol, nyger, phacélie, lin… qui peuvent compléter les autres familles selon leurs caractéristiques. La phacélie semée assez tôt peut donner un très bon couvert en solo. Elle est gélive à des températures inférieures à -5°C mais reste plaquée au sol après gel ce qui permet de continuer à protéger le sol de l’érosion.

Des mélanges ou des couverts d’interculture solo ?

Il est souvent conseillé de faire des mélanges pour profiter des avantages de chaque espèce. Par exemple, on peut associer 4 familles : une graminée pour la biomasse avec une légumineuse pour l’apport d’azote et l’équilibre C/N avec une crucifère pour la rapidité d’implantation et de couverture, et une autre espèce du type phacélie. On combine aussi les architectures aériennes pour éventuellement optimiser la production de biomasse et la couverture du sol ainsi que l’architecture racinaire en diversifiant les systèmes avec des plantes à pivot, des systèmes fasciculés, des enracinements profonds, d’autres superficiels.

En général, on conseille pour un mélange à quatre, de mettre 25 % de la dose pleine conseillée de chaque espèce. Mais chacun peut moduler selon ses priorités.
On peut viser des mélanges complexes à 10 espèces pour limiter les risques : sur 10 semées, il y en aura bien au moins 5 qui vont lever et bien se développer. Mais parfois associer trop d’espèces ensemble, peut amener à de la compétition entre elles : pour l’ombre, pour les éléments nutritifs… De plus, en général, la taille des graines n’est pas la même et, sauf à disposer d’un semoir double trémie, on positionnera certaines graines trop profond, ou pas assez. Et compte tenu du coût des semences, et de la multiplicité des espèces, on est amené à semer une dose faible, et du coup parfois insuffisante, pour une même espèce.
Il y a à ce sujet débat entre spécialistes… donc là encore pas de recette toute faite.

Des résultats sur des essais de couverts d’interculture au sein du GIEE Maxi Veg Bio

Au sein du GIEE Maxi Veg Bio, une plateforme a été mise en place sur Pontivy avec plusieurs mélanges à des densités différentes sur une même base d’espèces (phacélie, moutarde et un reste de radis) que l’agriculteur possédait. Nous avons ajouté des trèfles pour l’aspect fourniture d’azote avant maïs et du seigle, pour un coût de 60-70 €/ha en semences. Objectif : couvrir le sol le plus longtemps possible sans pénaliser la culture suivante, libérer l’azote au bon moment.

Semis mi-septembre

1

moutarde 4 kg, phacélie 2.5 kg, trèfle incarnat 2.5 kg, Micheli 2 kg, radis 1 kg

2

moutarde 3 kg, phacélie 2 kg, trèfle incarnat 2 kg, Micheli 2 kg, radis 1 kg, seigle fourrager 10 kg

3

moutarde 3 kg, phacélie 2.5 kg, trèfle incarnat 2.5 kg, radis 1 kg, seigle fourrager 10 kg

4

moutarde 5.5 kg, phacélie 2.5 kg, trèfle incarnat 2.5 kg, radis 1 kg

Semis + 7 j

4bis

moutarde 5.5 kg, phacélie 2.5 kg, trèfle incarnat 2.5 kg, radis 1 kg

5

moutarde 5.5 kg, phacélie 2.5 kg, trèfle Micheli 2.5kg, radis 1 kg

Les enseignements tirés d’essais en interculture :

  • On voit peu de différences de biomasse entre modalités de couverts sur la mesure de janvier (avant le gel) : 3 à 3.5 t MS/ha estimation méthode MERCI.
  • Le broyage réalisé (mi-décembre) en travers des modalités a permis de relancer la pousse de certaines espèces comme la phacélie par exemple mais a été un peu tardif.
  • Un rouleau a été passé début janvier sur gel, ce qui a très bien fonctionné mais pas de redémarrage du couvert derrière.
  • Les modalités semées mi-septembre ont beaucoup plus gelé malgré seulement une semaine d’écart au semis. Mais le couvert est reparti derrière (cf. photo du groupe mi-mars).
  • Les trèfles (Micheli, incarnat) se sont exprimés en mars et avril. Ils étaient plus développés sur les modalités semées une semaine plus tard (qui avaient moins de biomasse en janvier).
  • La couverture du sol a été longue, jusqu’à la destruction finale fin avril.
  • Le couvert a fonctionné comme un couvert relais avec les trèfles qui ont pris la suite, le trèfle de Micheli était un peu plus haut que le trèfle incarnat le 11 avril, alors que mi-mars aucune différence visible.
  • Le seigle n’a pas été semé assez dense : la méthode 6 espèces donc diviser la dose souhaitée par 6 (soit 10 kg à semer) n’est pas judicieuse pour viser un couvert relais, et le seigle a sûrement été mangé par les limaces.

A gauche modalité 4bis, à droite modalité 4 : effet du gel

D’autres tests ont été réalisés au sein du GIEE avec :

- solo contre multi espèces : le couvert de phacélie a été plus performant que le mélange à 8 espèces (le nyger qui représentait 30 % de la dose de semis en nombre de gr/m² représentait 70 % du poids de biomasse mi-novembre pour un semis mi-août, le mélange était moins couvrant que la phacélie, et du sclérotinia a été observé sur le nyger)

- doubles couverts :

  • un couvert d’avoine féverole semé fin novembre, dans du trèfle blanc, qui a mal levé (fatigue des légumineuses ? préparation du semis insuffisante avec destruction délicate du trèfle blanc)
  • une avoine féverole semée après couvert court (phacélie, sarrasin, moutarde) qui s’est bien développée.

Couverts relais ou double couvert ?

Ces observations et réflexions entraînent de nouvelles questions et pistes pour la prochaine plateforme de couverts (pas d’exportation ni en CIVE ni pour l’élevage dans ce système) :

  • tester des mélanges complexes comparés à des mélanges simples ou à une espèce solo
  • tester des doubles couverts : couvert estival puis destruction par gel, broyage avant semis du couvert hivernal. Bemol : 2 semis ce qui augmente les charges, à voir selon les gains ensuite
  • tester des couverts relais : semer en une fois le couvert estival et le futur couvert hivernal, broyer assez tôt le couvert estival pour laisser de la lumière au couvert d’hiver, doser plus les espèces du couvert hivernal.

Contact :

Clarisse BOISSELIER, Conseiller agronomie et cultures bio - 06 30 98 19 24 - clarisse.boisselier@remove-this.bretagne.chambagri.fr


A voir également :

Fiche technique couverts végétaux du guide GC bio APCA p 43

Webinaires adoptae chambres d’agriculture

 

 


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