Faut-il encore produire du blé meunier bio en Bretagne ?

En 2023, le nouveau seuil à 11 % de protéine pour vendre le blé en filière longue « meunerie » bio a été difficile à atteindre. La campagne bretonne a été particulièrement compliquée par les pluies arrivées fin juillet. A l’Ouest de la Bretagne, où les récoltes n’avaient pas démarré, ces pluies ont rapidement dégradé la qualité des blés et provoqué le déclassement de nombreux lots. Parallèlement, les prix de blés fourragers ont été particulièrement bas. Quels enseignements peut-on tirer de cette campagne céréalière difficile ?

Un marché du blé meunier bio qui se rétracte et induit un durcissement des contrats

Les stocks de report des blés bio sont en hausse dangereuse depuis 3 ans : les dernières collectes ont atteint des records, alors que les utilisations par les meuniers diminuent sans être compensées par les utilisations dans l’alimentation du bétail. Fin 2023, le stock de report de blé bio correspond à 75 % de l’utilisation annuelle des blés bio par les meuniers. Cette situation explique le durcissement des cahiers des charges, avec notamment la valeur du taux de protéines passée à 11 % pour accéder au marché des blés meuniers. Au passage, ce critère est surtout retenu par sa facilité de mise en œuvre : chaque dépôt agricole d’un organisme stockeur dispose d’un spectromètre qui permet cette analyse.

11 % de protéines, est-ce atteignable à coup sûr en Bretagne ?

Plusieurs facteurs expliquent la valeur protéique d’un blé. Le premier est non maîtrisable : il s’agit du climat, illustré cette année par les difficultés des blés de l’Ouest de la Bretagne. Selon les années, la sécheresse, l’excès d’eau ou les fortes températures peuvent faire varier le taux de protéines de 1.5 à 2 points. Le deuxième facteur est le choix variétal qui peut faire varier le taux de protéines de 1 à 1.2 % et le troisième facteur est la fertilisation azotée. Or les apports organiques tardifs ont une efficacité aléatoire. La dégradation et la minéralisation des engrais organiques dépendent, là aussi, de la météo et du sol.

Résultats des essais blés bio 2023 : un gradient Est-Ouest et de fortes variations entre variétés

Dans notre essai variétés de St Goazec (29) testant 33 variétés, la moyenne de taux de protéine était de 9.4 %, aucune variété ne dépassant 11 %. Les taux de protéine des essais positionnés à l’Est de la région (Est 56 et Rennes) étaient plus élevés, respectivement 9.8 et 10.6 % en moyenne, avec environ ¼ des variétés au-dessus de 11 %. Cette tendance se confirme avec nos vitrines : 2 plateformes dans le Finistère avec 9.5 % (Ergué-Gaberic) et 9.7 % (Clohars-Carnoët) de protéines en moyenne, et deux en Ille-et-Vilaine (Billé) à 11 % de protéines en moyenne et Nouvoitou pour une moyenne de 12 %.

Produire des blés meuniers a-t’il encore un intérêt économique en Bretagne ?

Pour vous aider dans vos choix, la matrice ci-dessous permet de voir à partir de quelle différence de prix et de rendement meunier/fourrager il est pertinent, économiquement, de viser du blé meunier. Lorsque les potentiels sont bons, un compromis rendement/qualité est testé grâce à des mélanges de variétés : il s’agit d’assembler des variétés complémentaires pour sécuriser les rendements sans trop pénaliser les taux de protéines et/ou la valeur boulangère. C’est l’objet des travaux des filières blés meunières locales qui se sont mises en place dans le Finistère et en Ille-et-Vilaine avec la filière Terres de Sources.

Contacts :

Pour le Finistère : Colette QUATREVAUX - Conseillère agriculture biologique - Tél : 06 88 27 89 92
Mail : colette.quatrevaux@remove-this.bretagne.chambagri.fr

Pour l’Ille-et-Vilaine : Soazig PERCHE - Conseillère agriculture biologique - Tél : 06 22 53 21 35
Mail : soazig.perche@remove-this.bretagne.chambagri.fr