Maïs population et autonomie agricole : sélection et la production de semences à la ferme

À Ploufragan (22), Elie est producteur de poulets de chair en vente directe. Depuis son passage en bio en 2010, il cherche à sécuriser son système, en réduisant sa dépendance aux achats extérieurs. Pour cela, il vise au maximum l’autonomie sur sa ferme. Et cela passe entre autres par la production de ses propres semences. C’est pourquoi, en 2021, il se lance dans le maïs épi. Retour sur son expérience.

Pourquoi se lancer dans le maïs population ?

Elie : « Je n’en fais que depuis 2 ans. Je cherche surtout à gagner en autonomie vis-à-vis des coopératives. Depuis que je suis en bio, j’ai vraiment changé mon regard. Toutes mes semences sont désormais produites à la ferme, même le colza. J’aime l’idée de maîtriser tout le processus. Toutes les étapes, de la sélection à la récolte, me plaisent. Et hormis l’aliment démarrage, je suis à 100 % d’autonomie pour l’alimentation des poules.
Quand j’étais salarié sur la ferme parentale, en conventionnel, je ne me posais même pas la question. Et c’était pareil pour les adventices ou la qualité du sol. Maintenant, je fais beaucoup de recherche sur internet, je m’intéresse aux plantes bio-indicatrices, et je cherche à comprendre pourquoi telle ou telle plante est présente sur la parcelle. »

Semailles avec une semence ancienne, défis rencontrés et améliorations apportées pour une deuxième saison

Elie : « J’ai été chercher de la semence population de 30 ans d’âge à Clermont-Ferrand car je ne savais pas qu’il y en avait dans le coin. J’en ai pris 500 kg, de quoi semer tout mon maïs. Et je me suis lancé. La première année n’a pas été fameuse, car je voulais semer 110 000 grains/ha, mais les grains étaient très gros et la dépression était insuffisante au niveau du semoir. Du coup, j’en ai semé 2 fois moins que prévu ! Mais j’ai quand même eu du super maïs. Cette année, j’ai corrigé le tir avec 110 000 grains/ha, mais je pense que c’était trop dense. Du coup, ça a pénalisé la taille des épis et leur précocité. J’ai quand même récolté 15 jours plus tôt que l’année passée. Pour ce qui est du rendement, je vise en moyenne 70-80 q/ha.»

Comment fais-tu ta sélection de maïs ?

Elie : « Je fais ma sélection manuellement sur 3 ha réservés, que j’implante à au moins 500 m de toute parcelle de maïs hybride pour éviter de les contaminer. Je ramasse en plusieurs fois l’équivalent de 3 m3 d’épis, de quoi ressemer 3 ha pour améliorer la semence tous les ans. Cette sélection manuelle est séchée à part, à plat, sur des grilles suspendues. Le reste est récolté avec un corn picker et séché en crible, ce qui me permettra de ressemer tout le maïs qui alimente les poulets. »

Mes critères de sélection de maïs population sont :

• la précocité : je choisis de préférence les épis qui ont la tête en bas, signe de mûrissement. De même j’ai une préférence pour le maïs corné (grains bombés- signe de précocité) plutôt que denté
• le rendement : je prélève les épis sur les pieds qui en ont 2 plutôt qu’un seul.
• le nombre de grains par épi
• le remplissage des grains

L’année prochaine, je mélangerai ma sélection avec celle plus précoce d’un voisin. »

Processus de séchage et préparation de la semence : une méthode précise et protégée contre les rongeurs

Elie : «La semence sélectionnée est séchée à plat sur des grilles suspendues par des fils de fer, pour empêcher les rongeurs d’y accéder. Le reste est séché dans des cribles (grille des cuves de 1 m3 entouré de grillage) dans lesquels je mets une rangée de drains au milieu pour assurer une bonne ventilation. Ces cribles sont stockés au sec dans un hangar. Lors des belles journées d’hiver, je peux les sortir avec la fourche du tracteur car ils sont posés sur une palette.

Pour faire ma semence, je passe les épis dans une vieille égraineuse électrique que j’ai récupérée et qui marche très bien. Elle ne tourne pas trop vite et ne fissure pas les grains. Je me suis rajouté devant, un petit système pour éliminer les grains du bout, souvent plus petits et plus tardifs.»

Optimisation de la semence : méthodes de test, calculs précis et techniques de semis pour des résultats optimaux

Elie : « Je procède à chaque fois à des tests de germination. Pour le moment, les résultats sont très bons, avec 98 % de germination. Je calcule le PMG (poids de mille grains) en pesant plusieurs paquets de 10 grains avec une balance de précision et en faisant la moyenne. Je prépare ensuite des doses de 50 000 grains.

Je sème autour du 15 mai, en 75 cm avec un semoir mono-graines, directement après un labour de surface à 15-20 cm. Les graines sont semées à 5-7 cm de profondeur. Je passe la herse étrille deux fois en pré-levée, 3 et 5 jours après le semis. Je bine dès le stade 3 feuilles et ensuite 2 fois à 1 semaine d’intervalle. »

Optimisation de la récolte : utilisation du corn picker pour préparer le maïs destiné à l'alimentation animale

Elie : « Le corn picker, que j’ai acheté d’occasion et mis sur une remorque, permet de ramasser un rang d’épis. Il va séparer les épis de la tige, enlever les fanes. Les épis sont donc prêts à être mis en crible pour sécher jusqu’à l’égrainage le printemps suivant. Le maïs qui servira à alimenter les animaux est récolté à la moissonneuse classique. »

L’organisation de la production de semences de maïs population chez Elie Guernion

La caractéristique du maïs population, c’est sa grande diversité génétique : chaque individu a un génome différent de son voisin. On peut donc le laisser se polliniser en fécondation libre, puis ensuite choisir les épis qui nous intéressent le plus pour produire de la semence. Voici comment je procède chez moi :

Contact :

Sarah BASCOU - Conseillère en agriculture biologique - Tél : 06 73 36 93 88 – Mail : sarah.bascou@remove-this.bretagne.chambagri.fr