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L’ensilage d’herbe : de la fauche à la table d’alimentation

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L'utilisation croissante de l'ensilage d'herbe dans les exploitations agricoles présente de nombreux avantages : autonomie en protéines, amélioration de la valeur nutritionnelle du lait ou de la viande, et rotation des cultures.

Les enjeux de l’ensilage sont importants : les pertes à la récolte et pendant la conservation peuvent tripler, passant d'un minimum de 10 à 12 % à plus de 30 % dans certains cas. Ces pertes entraînent à la fois une diminution des quantités de matières sèches distribuables et une altération de la qualité énergétique (UFL/kg MS) et protéique (MAT/kg MS).

Faucher au bon stade, mais pas uniquement

La qualité nutritionnelle de l'ensilage d'herbe à venir est principalement déterminée par le stade de croissance auquel la prairie sera fauchée. À partir de la montaison, tant la valeur énergétique que la valeur protéique diminuent rapidement. Trouver la bonne date de fauche implique de trouver un équilibre entre la quantité d'herbe disponible et sa qualité. Traditionnellement, le stade "début d'épiaison" (10 % d'épis sortants) est recherché pour atteindre ce compromis. Cependant, une tendance émerge où la qualité prime sur la quantité : faucher au stade "épis de 10 à 15 cm" permet d'obtenir un ensilage répondant aux besoins nutritionnels des animaux les plus exigeants.

Une fois l'herbe fauchée, le défi consiste à préserver la qualité du fourrage jusqu'à son utilisation à la table d’alimentation. Les pertes qui peuvent survenir par la suite peuvent être significatives, tant sur le champ qu'au moment de la mise en conserve.

Que sont les pertes sur le champ et comment les limiter ?

Les pertes sur le champ se présentent sous deux formes principales : les pertes de feuilles, notamment pour les légumineuses, et les pertes par respiration. Bien que le risque de perte de feuilles soit souvent pris en compte en limitant les interventions mécaniques, les pertes par respiration sont souvent négligées. Tant que l'herbe fauchée n'a pas atteint un taux de matière sèche de 35 à 40 %, la plante fourragère reste vivante, son métabolisme consommant une partie du sucre soluble qu'elle contient. Cela entraîne une perte de matière sèche hautement digestible, qui est essentielle lors du processus de fermentation dans le silo.

L'ensilage d'herbe est le mode de récolte qui permet de limiter les pertes sur le champ, car l'herbe atteint rapidement le taux de matière sèche nécessaire (35-40 %). Les pertes sont faibles (moins de 6 à 7 % de matière sèche) à condition que le séchage soit rapide, idéalement dans les 24 à 48 heures. Il est essentiel d'exposer le fourrage à la lumière autant que possible, car la lumière favorise l'ouverture des stomates (pores sur les feuilles), permettant ainsi à l'eau de s'évaporer des feuilles. Par conséquent, dès la fauche, il est important de disperser l'herbe de manière optimale, même si cela nécessite un andainage le jour suivant.

L’ensilage et la mise en conserve : des étapes clefs

L'ensilage est également le procédé qui engendre les pertes les plus importantes pendant la conservation. Il est important de noter que les pertes visibles dans le silo ne représentent qu'une fraction minime des pertes totales : la majeure partie des pertes demeure invisible. Pour comprendre ce phénomène, il est nécessaire de se rappeler les différentes étapes par lesquelles passe l'ensilage d'herbe une fois dans le silo.

Evolution normale d’un ensilage étape par étape

Une fois le silo bâché, la première phase est aérobie (en présence d'oxygène), et elle doit être aussi brève que possible (moins de 24 heures). L'acidification essentielle du silo par les bactéries lactiques ne peut se produire qu'en l'absence d'oxygène (anaérobie). Ainsi, l'oxygène doit être éliminé, principalement par la respiration des plantes initiée sur le champ et se poursuivant dans le silo. Pendant cette période, une fermentation initiale par des entérobactéries et des levures commence, produisant l'odeur piquante de vinaigre qui peut être perceptible dans les ensilages. Si cette odeur est particulièrement forte, cela signifie probablement que cette phase a été prolongée.

Il est donc crucial de minimiser la présence d'air lors de la construction du silo. Une coupe fine (entre 3 et 7 cm) et une teneur en matière sèche ne dépassant pas 45 % facilitent le tassage. Le tas doit être recouvert dès la fin du processus de récolte.

Une fois l'oxygène épuisé, la phase de fermentation lactique débute, généralement pendant environ deux semaines. Les bactéries lactiques consomment une partie des sucres solubles disponibles pour produire de l'acide lactique. Cette acidification diminue le pH du fourrage, assurant sa conservation à long terme. Il est important de noter que plus le fourrage est humide et riche en MAT, plus il est difficile à acidifier. C'est pourquoi une teneur en matière sèche d'au moins 30 % est nécessaire au moment de l'ensilage. Si cette teneur en matière sèche n'est pas atteinte, l'utilisation d'un conservateur peut être nécessaire. Les légumineuses, en raison de leur teneur élevée en MAT et de leur richesse en calcium, ont un pouvoir tampon élevé, ce qui ralentit la baisse du pH. En revanche, l'acidification est plus rapide avec un fourrage riche en sucres solubles, comme c'est le cas pour les graminées et les coupes précoces.

Si le pH atteint un niveau suffisamment bas (pH < 4,3 à 30 % de MS et pH < 4,7 à 50 % de MS), les fermentations s'arrêtent. Tant que le silo reste hermétique, le fourrage demeure stable jusqu'à son ouverture. Si le pH n'est pas suffisamment bas, des fermentations, notamment butyriques, peuvent se produire et entraîner des pertes importantes, en particulier dans le cas d'ensilages d'herbes trop humides.

À l'ouverture du silo, l'oxygène est de nouveau disponible au niveau du front d'attaque, ce qui relance les fermentations. Il est donc nécessaire de progresser suffisamment rapidement pour limiter les pertes.


A retenir :

  • Choisir la bonne fenêtre météo : idéalement 48 heures avec un ensoleillement « breton »
  • Faucher précocement : lorsque les épis atteignent environ 10 cm ou au début de l'épiaison pour obtenir un volume maximal.
  • Maximiser l'exposition à la lumière pour un séchage rapide : faucher à plat ou pratiquer le fanage dès la récolte.
  • Limiter les interventions mécaniques, mais les utiliser si nécessaire.
  • Viser un taux de matière sèche de 35 à 40 % au moment de l'ensilage, en 24 heures, ou 48 heures si la récolte comprend beaucoup de légumineuses.
  • Tasser soigneusement et couvrir rapidement.

Notre référent est à votre écoute :

Benoît POSSEME - Chargé d'études et de conseil Fourrages Productions herbivores - 06 78 70 74 72 - benoit.posseme@remove-this.bretagne.chambagri.fr